Aujourd’hui, un promeneur longeant la Loire du village des Augers, à Liré, pour se rendre à la Loge en Vallée à Bouzillé, ne verra, sur les rives et au milieu du fleuve, que quelques pêcheurs à la ligne, les uns traquant du poisson blanc, les autres des carnassiers dont le très recherché silure tant sont intenses les émotions que sa pêche procure. Bref, pas grand monde en somme, alors qu’il y a cinquante ans, d’où le titre, les pêcheurs étaient des dizaines à se presser au bord du fleuve. Que s’est-il passé ?
La Loire était alors un autre fleuve qu’aujourd’hui ; son niveau à volume d’eau équivalent était supérieur de trois mètres, ce qui changeait tout. Le bras des Babins en face du camping était relié quasiment toute l’année au fleuve ce qui permettait d’avoir un courant d’eau bénéfique aux poissons et à la pêche. Les abords au fleuve étaient plus faciles : on pouvait pêcher sans avoir à descendre les enrochements comme aujourd’hui. On m’a rapporté que certains dimanches d’été, il pouvait y avoir entre cinquante et cent automobiles stationnées de la Rabottière aux Babins.
Les pêcheurs étaient bien sûr des gens du coin, mais beaucoup venaient des « Mauges » et une partie passaient leurs vacances d’été au camping des Babins qui était, avec celui de la Loge en Vallée, occupé presque exclusivement par les amoureux de la pêche, ce qui amenait une convivialité épatante. Deux bistrots, l’un aux Babins, l’autre à la Rabottière, dénommé « le Casino » avec ses jeux de boules de sable, ne désemplissaient pas les samedis et les dimanches.
Eh bien tout cela : « c’est bien joli » comme on dit, mais que pêchaient-ils ces passionnés qui devaient se lever bien avant l’aube pour avoir les bonnes places convoitées ? Eh bien des poissons dont certains ont disparu comme le hotu surnommé, on ne sait pourquoi, « gardon de Varades » qui se pêchait allégrement à remplir les bourriches des pêcheurs qui ne savaient, pour la plupart, qu’en faire car le pauvre hotu, objet de malédictions et d’injures en tout genre, était comme on dit « immangeable » avec une chair molle et farcie d’arêtes, qui décourageait ceux qui tentaient de les accommoder. Le hotu mis à part, on pêchait les poissons nobles comme la perche ou le brochet, poissons carnassiers, avant l’arrivée fracassante du sandre qui est devenu ensuite le poisson noble le plus recherché. On pêchait la brème, le gardon, le barbillon pour lesquels les pêcheurs préparaient des litres de blé ou de chènevis qu’ils faisaient cuire, pour certains, dans le four du boulanger.
A l’époque que j’ai connue, La Loire débordait régulièrement, le bras majeur étant régulièrement inondé. Les « boires », telles que Sainte Catherine piégeaient des quantités incroyables de poissons, ce qui faisait le bonheur des propriétaires et riverains qui pêchaient au filet et d’autres qui faisaient la même chose mais la nuit.
Aujourd’hui, il y a peu de pêcheurs notamment sur les rives notamment sur les rives. L’abaissement du seuil du fleuve provoqué par plusieurs facteurs, en particulier la destruction de seuils naturels et l’extraction inconsidérée du sable ainsi que l’accélération du courant ont changé la donne.
L’évolution de la vie et des loisirs a également participé à cette lente disparition des pêcheurs et de la convivialité au bord du fleuve.
Des travaux sont prévus dans les années qui viennent pour restaurer le lit de la Loire ; souhaitons qu’ils portent leurs fruits et qu’on puisse la revoir comme nous l’avons connue.
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