lundi 20 décembre 2021

1945 : le retour des prisonniers

 Les bulletins paroissiaux annuels rédigés par le curé Brec pour les années 1939 à 1943 et le curé Le Boulh pour les années 1944 et 1945 fournissent des renseignements précieux sur la vie à Bouzillé pendant la deuxième guerre mondiale. On va s’intéresser aujourd’hui aux prisonniers de notre commune.

Les prisonniers

A la déclaration de guerre en 1939, le curé Brec a le moral : n’écrit-il pas en août à propos des mobilisés : « Espérons qu’ils reviendront bientôt et victorieux ! ». La suite des événements ne correspondra pas tout à fait à ses vœux.

En 1940, sur les 105 hommes mobilisés, 71 le sont dans les formations de l’avant, 30 dans les services de l’arrière et 4 en Afrique du Nord et en Syrie. Suite à la défaite de la France en 1940, 42 soldats sont faits prisonniers.

En 1941, 5 d’entre eux rentrent à Bouzillé : Louis Aillerie, Pierre Chesné, Victor Réthoré, Edouard Barreau et Alphonse Allard. 1943 voit le retour de 4 prisonniers : Marcel Nicolas et Paul Cussonneau du Fossé neuf, Georges le frère de l’abbé Caillaud et Marcel Martin, mari d’une réfugiée du nord.

En revanche, dès la fin de 1942, des jeunes sont requis par le STO, Service du Travail Obligatoire, et partent en Allemagne. C’est le cas d’Emile Morinière. Puis, en 1943, c’est une nouvelle fournée : Pierre Dénéchère, l’instituteur, au nord de la Norvège, Eugène Chéné, Eugène Martin et Joseph Neau dans la région de Stettin, Joseph Coiffard et Maurice Mosset près de Cologne.

La solidarité

Très vite, la commune va venir en aide aux prisonniers. Dès 1941, les envois de colis, pour environ 10 000 francs, marquent la générosité des habitants. En 1942, une collecte atteint la somme de 14 300 francs. Les bénéfices des séances de variétés et la vente de billets de tombola permettent d’envoyer 20 000 francs « aux chers absents » comme l’écrit le curé Brec. Enfin, une grande kermesse, en août 1943, dans le parc du château de la Mauvoisinière, permet d’envoyer « une recette substantielle » aux prisonniers.

Le retour

En 1945, les prisonniers sont tous rentrés. Le dernier à revenir à Bouzillé est Jean Chesné. Il est vrai qu’il a fait un long périple depuis la Russie où il rencontré le marquis de Saint Pern lui aussi prisonnier. Son retour, le 31 juillet 1945, correspond au jour du mariage de Victor Thiau à la Guichetière auquel il a bien sûr joyeusement participé.

Les fêtes et cérémonies

Le 9 septembre 1945, une grande fête est organisée en l’honneur des prisonniers et déportés. Après la messe célébrée par le chanoine Brec, devenu archiprêtre de Saumur, un banquet rassemble tout le monde. Le capitaine Gautier évoque les tristes et interminables jours de la captivité, en particulier, le maigre brouet servi dans les camps de prisonniers. Il remercie le Comité d’Entraide qui s’est tant dépensé pour les captifs. Une photo de groupe réunit tous les convives.


Au centre, le maire Charles Pousset, entouré des curés Brec et le Boulh et le porte drapeau moustachu, Georges Bondu, dit « Galipette ». ( les noms des autres participants figurent dans le livre : « Bouzillé à travers les âges »).

Le 11 novembre suivant, près du Monument aux Morts au cimetière, Charles Pousset, le nouveau maire énumère le nom des 6 jeunes qui ne sont pas revenus: Joseph et Maurice Terrien, Paul Grimault, Joseph Hangouet, Robert Réthoré et Joseph Viau.

 

mercredi 15 décembre 2021

La pêche à la ligne, il y a une cinquantaine d'années

Aujourd’hui, un promeneur longeant la Loire du village des Augers, à Liré, pour se rendre à la Loge en Vallée à Bouzillé, ne verra, sur les rives et au milieu du fleuve, que quelques pêcheurs à la ligne, les uns traquant du poisson blanc, les autres des carnassiers dont le très recherché silure tant sont intenses les émotions que sa pêche procure. Bref, pas grand monde en somme, alors qu’il y a cinquante ans, d’où le titre, les pêcheurs étaient des dizaines à se presser au bord du fleuve. Que s’est-il passé ? 
 
La Loire était alors un autre fleuve qu’aujourd’hui ; son niveau à volume d’eau équivalent était supérieur de trois mètres, ce qui changeait tout. Le bras des Babins en face du camping était relié quasiment toute l’année au fleuve ce qui permettait d’avoir un courant d’eau bénéfique aux poissons et à la pêche. Les abords au fleuve étaient plus faciles : on pouvait pêcher sans avoir à descendre les enrochements comme aujourd’hui. On m’a rapporté que certains dimanches d’été, il pouvait y avoir entre cinquante et cent automobiles stationnées de la Rabottière aux Babins.
 Les pêcheurs étaient bien sûr des gens du coin, mais beaucoup venaient des « Mauges » et une partie passaient leurs vacances d’été au camping des Babins qui était, avec celui de la Loge en Vallée, occupé presque exclusivement par les amoureux de la pêche, ce qui amenait une convivialité épatante. Deux bistrots, l’un aux Babins, l’autre à la Rabottière, dénommé « le Casino » avec ses jeux de boules de sable, ne désemplissaient pas les samedis et les dimanches.
 
 Eh bien tout cela : « c’est bien joli » comme on dit, mais que pêchaient-ils ces passionnés qui devaient se lever bien avant l’aube pour avoir les bonnes places convoitées ? Eh bien des poissons dont certains ont disparu comme le hotu surnommé, on ne sait pourquoi, « gardon de Varades » qui se pêchait allégrement à remplir les bourriches des pêcheurs qui ne savaient, pour la plupart, qu’en faire car le pauvre hotu, objet de malédictions et d’injures en tout genre, était comme on dit « immangeable » avec une chair molle et farcie d’arêtes, qui décourageait ceux qui tentaient de les accommoder. Le hotu mis à part, on pêchait les poissons nobles comme la perche ou le brochet, poissons carnassiers, avant l’arrivée fracassante du sandre qui est devenu ensuite le poisson noble le plus recherché. On pêchait la brème, le gardon, le barbillon pour lesquels les pêcheurs préparaient des litres de blé ou de chènevis qu’ils faisaient cuire, pour certains, dans le four du boulanger.
 A l’époque que j’ai connue, La Loire débordait régulièrement, le bras majeur étant régulièrement inondé. Les « boires », telles que Sainte Catherine piégeaient des quantités incroyables de poissons, ce qui faisait le bonheur des propriétaires et riverains qui pêchaient au filet et d’autres qui faisaient la même chose mais la nuit. Aujourd’hui, il y a peu de pêcheurs notamment sur les rives notamment sur les rives. L’abaissement du seuil du fleuve provoqué par plusieurs facteurs, en particulier la destruction de seuils naturels et l’extraction inconsidérée du sable ainsi que l’accélération du courant ont changé la donne.
L’évolution de la vie et des loisirs a également participé à cette lente disparition des pêcheurs et de la convivialité au bord du fleuve. Des travaux sont prévus dans les années qui viennent pour restaurer le lit de la Loire ; souhaitons qu’ils portent leurs fruits et qu’on puisse la revoir comme nous l’avons connue.